RDCongo - Customary law – Consumption use
CONSOMMATION
Normes et pratiques de droit coutumier
République Démocratique du Congo
CONTEXTE
La Constitution de la République Démocratique du Congo (RDC) consacre la coutume comme l’un des modes d’acquisition des droits fonciers et comme une source de droit auxiliaire pouvant être invoquée devant les juridictions locales tant qu’elle n’est pas contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs. Elle reconnaît également l’autorité coutumière comme une source de légitimité politique et sociale à l’échelon local ainsi que les chefs coutumiers qui bénéficient d’un statut particulier. Des droits sur les terres et les ressources naturelles sont également reconnus aux communautés locales et populations autochtones par plusieurs lois sectorielles sur le fondement de l’usage et de la coutume, notamment concernant les forêts et les terres agricoles. Par ailleurs, la loi n° 22/030 du 15 juillet 2022 portant protection et promotion des droits des peuples autochtones pygmées garantit les droits politiques, économiques et sociaux des peuples autochtones pygmées. La Réserve de Faune à Okapis (RFO) et le territoire de Mambasa sont situés au nord-est de la RDC. Les habitants de la RFO sont issus de plusieurs groupes ethniques. D’une part, les Bantous et les Soudanais, en particulier les Bila, les Lese, les Budu et les Nande (ces derniers venus de la province du Nord-Kivu). D’autre part, les peuples autochtones pygmées avec les Efe et les Mbuti.
CONSOMMATION
Pratiques coutumières d'utilisation de la faune
Les Bantous chassent principalement à l’aide de fusils et de pièges à base de nylon ou de câbles métalliques. Les peuples autochtones pygmées ont des méthodes de chasse traditionnelles différentes selon les groupes. Les Mbuti chassent traditionnellement en groupe, avec des filets, des lances et des chiens. Une fois attrapé, l’animal est tué en utilisant des lances. Les femmes et les enfants participent à la chasse en rabattant les animaux vers les filets. Les Efe quant à eux chassent plutôt seuls et utilisent des arcs et des flèches, y compris des flèches empoisonnées. Sous l’influence des Bantous, les Mbuti et les Efe font désormais également usage de pièges à base de nylon ou de câbles métalliques.
Pour les Bantous comme pour les peuples autochtones pygmées, la saison des pluies est en général plus favorable à la chasse, dans la mesure où la pose des pièges et le repérage des traces des animaux sont plus simples que durant la saison sèche lorsque le sol est très dur. Les peuples autochtones pygmées chassent néanmoins toute l’année, avec une plus faible intensité lors de la période de récolte du miel (de juin à septembre) et de certains fruits ou produits forestiers.
Chez les Bantous, les produits de la chasse sont partagés avec le chef du village et le cercle familial selon des règles établies par la coutume, même si elles ne sont plus forcément toujours respectées à ce jour. Les produits peuvent aussi être vendus ou échangés contre d’autres produits, alimentaires ou non. La vente se déroule en principe devant ou à l’intérieur de l’habitation du chasseur mais elle peut également avoir lieu directement en forêt à des revendeurs. Le transport des viandes se fait à pied, en pirogue, en moto, en vélo ou en voiture et en utilisant des éléments naturels comme des feuilles ou des paniers faits de bois et de lianes. Les populations consomment la viande à l’état frais ou à l’état boucané, selon les espèces et les contraintes de conservation.
Chez les peuples autochtones pygmées, les animaux abattus sont en général dépecés et découpés directement en forêt, par la personne la plus âgée du groupe. Les Mbuti et les Efe échangent les produits prélevés dans la forêt avec les Bantous contre une rémunération ou contre d’autres produits. En général, les peuples autochtones pygmées ne stockent ni ne conservent la viande, ils la consomment à l’état frais.
Tabous liés à la chasse et à la consommation de viande sauvage
Tant chez les Bantous que chez les peuples autochtones pygmées, il existe des animaux dont la chasse est interdite à cause de leur caractère sacré. De manière générale, les Bantous des villages partenaires du SWM Programme ne chassent ni ne consomment le rat de géant d’Emin (Cricetomys emini), la civette africaine (Civettictis civetta), le chimpanzé (Pan troglodytes), les serpents et l’okapi (Okapia johnstoni). La peau de l’okapi est toutefois utilisée lors de l’intronisation des chefs coutumiers et le léopard (Panthera pardus) est également un animal qui représente le pouvoir du chef coutumier. Le pangolin géant (Smutsia gigantea) est un animal respecté localement car il aurait creusé un passage pour aider les ancêtres de la communauté à traverser la rivière Ituri. D’autres espèces comme l'écureuil (Sciuridae spp) ou l’athérure africain (Atherurus africanus) sont également considérées comme des animaux sacrés par certains clans. De même, les peuples autochtones pygmées voient certains animaux comme étant des totems car soit ils sont considérés comme l’incarnation d’un individu ou d’un ancêtre, soit ils sont réputés être venus en aide à leurs ancêtres. Ces animaux totems sont en général des antilopes ou des singes pour les hommes et des serpents ou des athérures pour les femmes. Conformément à la coutume, la chasse et la consommation de ces animaux sont prohibées.
Tant chez les Bantous que chez les peuples autochtones pygmées, le non-respect des interdits liés aux animaux totems est réputé entraîner des maladies (maladies congénitales, perte des dents, etc.), des malheurs, voire la mort (Worldmark Encyclopedia of Cultures and Daily Life, 2023). Si les tabous portent en théorie à la fois sur le fait de capturer ou tuer l’animal et sur le fait de le consommer, il a été constaté que certains chasseurs capturent ou tuent des animaux totems pour les vendre et ne se s’attachent ainsi qu’à respecter l’interdit lié à la consommation de l’animal. Il y a également des remèdes possibles lorsqu’une personne enfreint un tabou. Par exemple, en cas de capture accidentelle d’un animal totem par un piège, l’animal doit être récupéré par une personne pour laquelle il n’est pas un totem et le chasseur doit ensuite détruire le piège.