GAB - Statutory law - Conflit Homme - Faune
CONFLITS HOMME-FAUNE SAUVAGE
GABON
RÉSUMÉ
La gestion des conflits entre les êtres humains et la faune sauvage (CHF) en République gabonaise repose sur des dispositions éparses contenues dans plusieurs textes qui s’imbriquent avec la Stratégie nationale et plan d’action de gestion des Conflits Hommes Faunes. En termes d'outils pour gérer durablement les CHF, les textes ont prévu: la légitime défense; les battues administratives; les contrats de gestion des terroirs dans le cadre des parcs nationaux et leurs zones périphériques; la mise en réserve de certaines espèces végétales; et l'élaboration d'un Plan national d’affectation des terres. Cette gestion repose sur une approche participative et une coordination des actions dans certains cas.
Les missions de battue administrative peuvent également être confiées à des lieutenants de chasse qui sont des auxiliaires de l'administration des Eaux et Forêts en matière de chasse et de protection de la faune sauvage. Cette fonction est gratuite. Toutefois, le lieutenant de chasse peut prétendre, le cas échéant, aux ristournes prévues en faveur des agents verbalisateurs.
Le dispositif institutionnel met à contribution aussi bien les administrations sectorielles (forêts, faune, pêche, ANPN, etc.) que le secteur privé, les organisations non gouvernementales nationales et internationales, les communautés locales ainsi que les instituts de recherches. Toutefois, en matière d’autorisation et de gestion des battues administratives, les compétences sont partagées entre les gouverneurs des provinces et le Ministère en charge des forêts. Cette implication des gouverneurs de province constitue la seule délégation de pouvoir observée en la matière. Pour faciliter la coordination des interventions, la création d'un comité de suivi est prévue par le biais d’un texte dont la signature est toujours en attente.
CONFLITS HOMME-FAUNE SAUVAGE
DISPOSITIONS GÉNÉRALES
La gestion des conflits entre les êtres humains et la faune repose principalement sur: la Stratégie nationale et plan d’action de gestion des Conflits Humains-Faune (CHF), la Loi n°16/2001 portant code forestier en République Gabonaise, la Loi n°003/2007 relative aux parcs nationaux, le décret n°0137/PR/MEFEPA du 4 février 2009 portant mise en réserve de certaines espèces végétales à usages multiples de la forêt gabonaise, et le Décret n°000183/PR/MEFMEPCPAT du 12 Juillet 2021 fixant les conditions d'autorisation des battues administratives.
Tout en identifiant les causes des conflits et leurs conséquences pour l'homme et la conservation de la faune, la stratégie en matière de CHF propose les actions principales suivantes: gérer de façon efficiente les animaux responsables des conflits; promouvoir les pratiques adaptées de protection des cultures contre les animaux à problème; renforcer les capacités techniques des parties prenantes dans la gestion des CHF; diminuer la compétition entre les humains et la faune sauvage pour les ressources naturelles; gérer efficacement les espaces agricoles pour atténuer la déprédation des cultures et du bétail et favoriser l’intensification de la production agricole et piscicole; intégrer la conservation de la faune dans la dynamique sociale et économique des communautés locales; élaborer des plans d’affectation des terres pour prévenir les conflits; et renforcer le cadre législatif, réglementaire et institutionnel sur les CHF.
Dans le cadre des textes de loi et des règlements en vigueur, plusieurs outils et approches ont été adoptés pour réguler ou gérer les CHF. La loi prévoit le droit à la légitime défense en cas de nécessité immédiate pour sa propre défense, celle d'autrui, de son propre cheptel domestique ou de sa récolte. Selon le Décret n°000183/PR/MEFMEPCPAT du 12 Juillet 2021, en cas de légitime défense contre un animal sauvage, le Service des eaux et forêts le plus proche doit en être informé. Il se chargera de récupérer les trophées pour transmission au stock national, alors que la viande sera donnée aux communautés de la zone d’abattage. Toute personne qui ne respecte pas ces dispositions s'expose à une peine d'emprisonnement de trois à six mois avec une amende allant de 100 000 à 10 000 000 de FCFA.
La loi réglemente aussi les battues administratives qui sont autorisées à la suite de dégâts importants ou répétés causés par certaines espèces animales sauvages aux cultures vivrières et aux animaux domestiques, mais aussi à tout autre bien ou aux personnes physiques. Les battues administratives sont aussi prévues pour la lutte contre les animaux blessés ou malades présentant un danger imminent pour les populations. Toute battue administrative est menée après autorisation du gouverneur de la province concernée, valable pendant un mois à compter de sa date de signature. Les trophées qui en sont issus sont récupérés par le Service local des eaux et forêts et sont immédiatement transmis au stock national pour les besoins de suivi et de traçabilité. La viande est également mise à la disposition des communautés et ne peut être commercialisée. Tout contrevenant s'expose à une peine d'emprisonnement de trois à six mois avec le paiement d’une amende allant de 100 000 à 10 000 000 de FCFA.
Les missions de battue administrative peuvent également être confiées à des lieutenants de chasse qui sont des auxiliaires de l'administration des Eaux et Forêts en matière de chasse et de protection de la faune sauvage. Le candidat aux fonctions de lieutenant de chasse doit être de nationalité gabonaise, âgé de vingt et un ans au moins, de bonne moralité, titulaire d'un certificat de chasseur professionnel délivré par arrêté du ministre chargé des eaux et forêts et justifier d'une expérience suffisante en matière de faune sauvage et de chasse sportive. En sont exclues les personnes ayant été condamnées pour crime ou délit de chasse. Cette fonction est gratuite. Toutefois, le lieutenant de chasse peut prétendre, le cas échéant, aux ristournes prévues en faveur des agents verbalisateurs. S'il n'est pas guide de chasse, le lieutenant de chasse ne peut participer à des opérations commerciales en rapport avec ses fonctions ni prétendre à rémunération de ses services.
Les contrats de gestion de terroirs peuvent aussi être conclus entre l'Agence nationale des parcs nationaux (ANPN) et les populations locales pour la surveillance, la gestion, l’entretien, l’animation culturelle et touristique du parc ou de sa zone périphérique. Sans renvoyer directement à la gestion des CHF, ces contrats peuvent permettre de développer des opérations de surveillance en vue de déclarer les dégâts causés par les animaux.
La loi prévoit aussi la mise en réserve de certaines espèces végétales afin de limiter les CHF, s’agissant d’espèces exploitées notamment par les éléphants et dont la pénurie les obligerait à sortir des forêts. Cinq espèces végétales sont interdites d'abattage, sont classées non-exploitables et non-commercialisables pour une durée de vingt-cinq ans à compter du 1er janvier 2009. Il s'agit de Afo Poga oleosa Rhizophoraceae, Andok Irvingia gabonensis Irvingiaceae, Douka (Makoré) Tieghemella Africana Sapotaceae, Moabi Baillonnella toxisperma Sapotaceae et Ozigo Dacryodes buetnerii Burseraceae.
Enfin, l'élaboration du Plan national d’affectation des terres (PNAT) vise à gérer efficacement les conflits entre les êtres humains et la faune. Le Gabon prévoit expressément l’élaboration d’un tel plan dans sa stratégie; un programme actuellement mis en œuvre par le Central African Forest Initiative (CAFI) vise concrètement cet objectif. À ce jour, seule une version initiale du PNAT est disponible et présente la situation des terres affectées au Gabon.
Concernant les indemnisations des dommages causés par la faune sauvage, référence est souvent faite dans la pratique au Décret n°1016/PR/MAEPDR du 24 août 2011 qui fixe le barème d’indemnisation à verser en cas de destruction volontaire de cultures, de bétail, de bâtiments d'élevage, d'étangs piscicoles ou de ressources halieutiques. Ce texte s’applique, toutefois, aux destructions volontaires, c’est-à-dire celles prévues dans le cadre des expropriations pour cause d’utilité publique. À ce jour donc, aucun texte ne traite du mécanisme d'indemnisation et de prise en charge des victimes des CHF.
CADRE INSTITUTIONNEL RELATIF AUX CONFLITS HOMME-FAUNE SAUVAGE
CADRE INSTITUTIONNEL
La stratégie nationale de gestion des conflits entre les êtres humains et la faune sauvage (CHF) prévoit une démarche participative dans la gestion des CHF à travers l’implication de quatre types d'acteurs:
• Institutions publiques représentées par: les ministères des eaux et forêts, de l’environnement et du développement durable, de l’agriculture, de l’intérieur, de l’aménagement du territoire, de la santé, de la recherche scientifique; les organismes partenaires au niveau sous régional, régional et internationale;
• Organisations non-gouvernementales;
• Organisations paysannes;
• Opérateurs privés (entreprises forestières, minières, pétrolières, agricoles, etc.)
Les responsabilités ne sont pas réparties selon ces quatre catégories, mais plutôt en fonction de la nature sectorielle ou transversale des axes stratégiques.
Concernant spécifiquement la mise en œuvre des battues administratives, le gouverneur peut l’autoriser ou la refuser après enquête des agents des eaux et forêts sur le terrain.
S'agissant de la gestion du contentieux qui peut résulter des CHF, ceci n’entre pas dans le champ des compétences des juridictions spécialisées en matière de faune au sein du Tribunal de Libreville.
COORDINATION ET COOPÉRATION INSTITUTIONNELLES
La stratégie nationale de gestion des conflits entre les êtres humains et la faune sauvage (CHF) au Gabon prévoit l'implication «de tous les acteurs concernés par la problématique des conflits hommes-faune » (3.2 Modalités de mise en œuvre). Ces acteurs sont regroupés en quatre catégories: institutions publiques, organisations non-gouvernementales, organisations paysannes, opérateurs privés. De même les responsabilités ont été réparties non pas selon ces quatre catégories, mais plutôt en fonction de la nature sectorielle ou transversale des axes stratégiques (3.2 Modalités de mise en œuvre). En tenant compte du caractère transversal de certains axes, la stratégie prévoit la mise en place par un texte d'un comité de coordination qui implique les acteurs du niveau institutionnel. Le texte sur la battue administrative abonde également dans ce sens en prévoyant l’intervention simultanée du gouverneur de province pour la signature de l’autorisation de battue administrative et l’implication du Service des eaux et forêts pour les enquêtes de terrain, les abattages, la gestion des trophées et la redistribution de la viande qui en est issue.